Les ornithologue l’attendent avec impatience, chaque année, la migration de printemps est le signe d’un renouvellement, la promesse des beaux jours à venir et d’observations diversifiées et parfois surprenantes.

A l’automne dernier les oiseaux nés sous nos latitudes ou plus nordiques, sont partis vers des régions plus propices jusque dans le sud de l’Afrique pour certains d’entre eux.

Pouillot siffleur à Beauduc

A ce comportement ancestral une raison principale : avec le froid , les sources de nourritures deviennent insuffisantes, surtout pour un aussi grand nombre d’oiseaux : quand ils ne sont pas ensevelis sous la neige et la glace, les végétaux, vers et insectes qui constituent l’ordinaire ont tout bonnement disparus du nord de l’Europe plongé dans la léthargie hivernale. Pour les espèces les moins adaptés à cette situation nouvelle, Il faut donc partir pour continuer à trouver pitance et chaleur et rejoindre des cieux plus cléments !

L’idée que les Hirondelles nichants en Camargue ont peut-être survolé il y a quelques semaines les savanes Africaines, qu’elles ont ensuite traversé le Sahara, puis la Méditerranée pour rejoindre leurs colonies natives, est toujours pour moi source d’étonnement et de rêveries.

Hirondelles de rivages se reposant en bordure de plage aux Saintes-Maries de la mer

Un voyage romantique, mais surtout périlleux. Combien d’oiseaux morts d’épuisement dans le désert ? disparus en mer lors de la traversée de la Méditerranée ? combien d’autres capturés dans les milliers de filets tendus le long de la côte nord de l’Afrique ? Lors de la migration de printemps, les oiseaux qui reviennent sont beaucoup moins nombreux que ceux qui sont partis.

Au fil des mois…

En février, c’est un frémissement : des barges à queue noires, des Courlis cendrés sont déjà observés dans les prairies humides, rejoignant les pluviers hivernants.

Début mars, ici et là on note quelques arrivants précoces : pouillots fitis, huppes, même le coucou-geai est là.

C’est en avril que la migration connaît son pic : c’est le retour des Hirondelles, des Rossignols, des Rousserolles… Au fil du mois, les arrivées se font plus nombreuses et d’autant plus faciles à observer qu’en cette période nuptiale, les oiseaux chantent pour séduire leur partenaires ou délimiter leurs territoires. Torcols, Coucous, Loriots, Gobemouches, Rougequeues, Fauvettes et autres passereaux défilent. Parfois, un oiseau rare, égaré d’Amérique du nord ou d’Asie ponctue une journée d’observation déjà bien remplie.

Hypolaïs polyglotte dans un frèle Tamaris de la plage de Piémanson

En mai paraissent les retardataires, Parmi les plus colorés, les Guêpiers d’Europe marquent leur retour de leurs cris roulés si caractéristiques, les Rolliers sont là aussi, bien que plus discrets.

Guêpiers d’Europe à Scamandre

Quelques oiseaux inhabituels apparaissent brièvement : Bécasseaux falcinelles, Fauvettes de Moltoni, tandis que les rares Glaréoles figurent parmi les plus tardives à rejoindre leurs sites de nidification Camarguais.

Glaréole à collier

Où observer la migration en Camargue ?

Pour observer la migration en Camargue, rien de plus facile. Chaque bosquet, chaque marais, chaque plage peut révéler son lot de visiteurs. Munissez vous de jumelles et pointez les sur ces ombres furtives qui se faufilent entre les branches. Vous pourriez être surpris par la diversité d’espèces qui s’offre à vous !

Plusieurs sites sont réputés pour accueillir régulièrement un grand nombre de migrateurs :

Des passereaux…

En ce qui concerne les passereaux, les plages de Beauduc, de Piemanson et de l’Espiguette, ainsi que les abords des camping des Saintes-Maries de la mer sont bien connus des passionnés. Les frêles arbustes (souvent des tamaris), les mares côtières et les hautes herbes recueillent les oiseaux épuisés trouvant leur salut sur les premières terres après la grande traversée.

Gobemouche noir à Salin de Giraud

Certains – rares – matins, on assiste à une pluie de passereaux, lorsque les vents ont été favorables, qu’il ne pleut pas ou que le mistral ne souffle pas trop. Des conditions sommes toutes peu fréquentes et qui expliquent la concentration d’un grand nombre de migrateurs sur quelques jours imprévisibles en fonction des aléas.

Peu à peu, les oiseaux échoués sur nos plages et qui ne nichent pas ici, remontent l’arrière pays à travers bosquets et bois, en une migration dite rampante, tandis que d’autres, après avoir repris des forces, entameront un vol direct de centaines de kilomètres pour continuer leur périple vers le nord.

Le chant du Rossignol accompagne le printemps

Mais ne nous y trompons pas, si les passereaux sont toujours là au printemps, ils sont chaque année moins abondants, et l’on peut désormais craindre le moment ou les migrateurs ne se compterons plus par dizaines, voire centaine les bons jours sur les bons sites, mais à l’unité !

Des rapaces…

Les rapaces migrateurs passent en nombre en Camargue, notamment les Circaètes jean-le-blanc, les Bondrées apivores, Eperviers, Busards, Faucons hobereaux, Milans royaux et noirs et le toujours très attendu Balbuzard pêcheur. Régulièrement quelques Faucons kobez apparaissent en fin avril- début mai en nombre plus ou moins élevé suivant les années.

Balbuzard pêcheur en migration

Des oiseaux aquatiques

Quand aux oiseaux de rivages : Hérons pourprés et crabiers, Blongios nains, Spatules blanches, Cigognes blanches et noires sont de retour sur leurs sites de reproduction, ou de passage dans les marais. Les canards nicheurs se cantonnent déjà tandis que les sarcelles d’été apparaissent ça et là, en transit.

Héron crabier dans les marais du Vigueirat

En mai, les rizières sont remises en eau. Pour celles qui n’ont pas subis de traitements chimiques trop intensifs, l’inondation progressive incite vers, insectes et autres habitants sous-terrains, à sortir, fournissant une nourriture providentielle aux Chevaliers, Gravelots, et Bécassines de passage (qui éliminent par la même occasion force larves de moustiques).

Les rizières en eau attirent les limicoles en migration
Chevalier culblanc

Sur les côtes, notamment le long de la route de Piemanson et de la piste de Beauduc, tout un peuple d’oiseaux des vases, les limicoles, se presse. Les milliers de bécasseaux récompenseront l’observateur de leurs vols en escadrilles, virevoltants et toujours changeants.

Bécasseaux variables, cocorlis et un sanderling le long de la route de Piémanson.

Des rassemblements de Sternes caujeks, pierregarins et naines, auxquels se mêlent quelques Sternes Caspiennes se forment dans les lagunes. Les Guifettes noires, mais aussi moustacs et parfois leucoptères, se joignent volontiers à ces rassemblements.

Guifettes noires à Piemanson

Enfin, si l’on observe vers le large, depuis Piemanson ou Beauduc, il existe des chances raisonnables d’observer des oiseaux marins : Plongeons, Puffins, Fous de Bassans, Labbes… sont possibles.

Texte et images © L.Wittmer, sauf photo Balbuzard © G.Rossini