Il y a quelques semaines, Gérard Rossini nous parlait de sa passion de photographe pour les couchers de soleil sur le Vaccarès. Aujourd’hui, nous démarrons une série d’articles sur cet étang à travers son histoire et son présent. Premier tour d’horizon :
L’étang du Vaccarès avec ses 6500 hectares de superficie et une faible profondeur ne dépassant jamais les 2 mètres est la plus importante pièce d’eau de Camargue.
Des écrits remontant à l’antiquité relatent les pêches sur le Vaccarès. Les hauts fonds mouvants de cet étang qui était alors encore bien moins profond que maintenant permettaient la pêche au harpon des bancs de poissons égarés dans les cuvettes en cours d’assèchement estival. Aujourd’hui quelques pêcheurs professionnels subsistent, pratiquant la pêche à la trabaque (filets se terminant par des nasses) permettant de capturer des Anguilles et des Athèrines (petits poissons destinés à la friture que l’on nomme ici des Joëls)
Des poissons côtiers remontent également jusqu’au Vaccarès : Loups, Muges, Soles…
L’étang, situé à l’interstice entre les eaux douces venues du Rhône et les eaux salées venues de la mer a longtemps été l’enjeu de conflits, notamment du fait des intérêts antagonistes des agriculteurs et des saliculteurs. Episodiquement, des conflits de gestion de l’eau réapparaissent montrant toute la difficulté à faire co-exister des intérêts parfois contradictoires sur un même territoire.
Le Vaccarès, un espace conflictuel au début du XXeme siècle
LES UNS, plutôt au nord, agriculteurs, gestionnaires de marais de chasse, déversent les surplus des eaux douces issues du Rhône. Elles sont entrées en Camargue par le jeu de pompes puissantes allant puiser l’eau dans le lit même du fleuve. Elles parcourent ensuite les centaines de kilomètres de Canaux et roubines destinés à l’irrigation, à l’alimentation des rizières et des marais de chasse du nord de la Camargue. En fin de processus, les surplus d’eau se retrouvent pour beaucoup dans le Vaccarès, contribuant à adoucir considérablement ses eaux.
LES AUTRES, plutôt au sud, industriels du sel, ont besoin de fortes concentrations d’eau salée obtenue grâce à l’eau de mer que l’on fait pénétrer au niveau des graus, puis que l’on distribue à travers un système complexe de pompes, roues à aubes, vannes. En cheminant durant de longs mois sous un soleil de plomb, à travers canaux et bassins, la concentration en sel augmente au fur et à mesure de l’évaporation des eaux. L’aboutissement est la récolte sur les tables salantes en début d’automne. Les débordements et les infiltrations du Vaccarès et de ses eaux bien moins salées nuisaient à ce processus et réduisaient les récoltes de sel.
La lutte était donc constante et passionée entre ceux qui avaient besoin d’eau douce et ceux qui au contraire recherchaient une salinité maximale
Un espace protégé depuis 1927
La création dès 1927 de la Réserve Nationale de Camargue, à l’initiative de la SNPN (Société Nationale de Protection de la Nature) a permis non seulement d’assurer une protection à cet étang unique en France, mais aussi de limiter les conflits qui déchiraient la Camargue.
La SNPN est toujours la gestionnaire de la Réserve Nationale de Camargue. Celle-ci dépasse largement les pourtours de l’étang, englobant une partie de la digue à la mer et des lagunes du sud Camargue. L’étang n’est pas accessible aux visiteurs mais visible depuis certaines de ces rives. Il abrite entre autre le mythique Bois des Rièges, un lieu interdit d’accès qui continue d’évoluer en dehors du temps et des interventions humaines et qui héberge des reliques des associations végétales et animales d’origine.
La SNPN propose à la Capelière, en bordure du Vaccarès, un centre d’accueil, un sentier de découverte et un musée. Un autre sentier existe à Salin de Badon, dont l’autorisation d’accès est à demander à la Capelière.
D’autres espaces protégés
Si le Vaccarès et la réserve nationale constituent le centre historique et géographique de la protection de la nature en Camargue, d’autres espaces ont été préservés au fil des années.
Le Conservatoire du Littoral gère notamment l’Espiguette et le site de la Camargue Gardoise, La palissade et une partie des anciens Salins de Salin de Giraud ainsi que les marais du Vigueirat.
Les Conseils Régionaux et Généraux (Bouches du Rhône, Gard) sont à l’origine de réserves complétant cette protection (Etang de l’Impérial, de Scamandre, la Marette à Aigues mortes …),
La Tour du Valat est née d’une initiative privée dans les années 1950. Ce vaste ensemble de marais et de sansouïres est dévolu à la recherche scientifique et à la préservation.
Dans un prochain article, nous vous convieront sur un itinéraire à vélo ou automobile, permettant de découvrir quelques points de vue sur le Vaccarès le long de ses 12 kilomètres de pourtour.
Photo coucher de soleil ©Gérard Rossini
autres photos © Laurent Wittmer